C’est le Nouvel An thaïlandais, la raison pour laquelle nous avons commencé notre voyage en restant en Thaïlande. L’an dernier, nous avons quitté le pays trois jours avant Songkran, ne pouvant pas rester pour les festivités car déjà en retard pour rejoindre le rallye. Donc cette année, on veut être de la fête !
Songkran pour les touristes, c’est surtout une énorme bataille d’eau sur trois jours ! S’asperger les uns les autres est une manière symbolique de se purifier, de laver les malheurs de l’année passée et de porter chance pour la nouvelle.
Première expérience
Nous avons déjà pu assister à une « attaque d’eau » le jour avant Songkran. Apparemment, au nord du pays, les festivités peuvent durer jusqu’à une semaine.
Plusieurs garçons postés le long de la route prennent une jeune fille qui passe en moto en embuscade. Elle lève un bras pour protéger son téléphone ; les garçons lui balancent plusieurs litres d’eau sur le corps, sans jamais mouiller son téléphone. Une fois bien trempée, elle repart comme si de rien n’était.
Nous sommes en voiture derrière la moto, arrêtés car elle bloque la route, en première ligne pour tout voir. C’est marrant à regarder, mais je n’aimerais clairement pas être à sa place. De notre côté, nous vérifions bien que toutes les portes et fenêtres sont fermées.
1er jour de Songkran
Notre hôtel est en plein centre-ville intra-muros, le long d’une rue principale. Notre hôtel, tout comme les autres le long de la rue, a installé de gros fûts d’eau et même un auvent.
Il est impossible de se rendre quelque part, même au café voisin, sans se faire gicler. On nous avait prévenus ! Nos téléphones sont bien emballés dans des sacs étanches.
Il y a du monde partout qui gicle, mais la vraie ambiance festive de la bataille, il faut aller le long des douves qui encerclent la vieille ville.
Batailles d’eau le long des douves
Les abords extérieurs des douves sont bordés de stands divers liés à Songkran. Beaucoup vendent des recharges d’eau, qu’ils pompent directement des douves à l’aide de seaux.
Nous nous postons d’abord au bord de la route, giclant les nombreuses voitures, pick-ups et motos qui passent, et faisant le plein de nos petits fusils à eau dans les douves.
La route fait le tour de la vieille ville à sens unique (l’autre sens étant intra-muros) ; on se rend vite compte que la plupart des pick-ups, avec des fûts d’eau et des gens armés de seaux dans la benne, font des tours juste pour le plaisir. Qu’il serait chouette d’être sur l’un de ces pick-ups !
Tour en pick-up
L’un s’arrête près de nous pour faire le plein ; c’est une famille, avec seulement trois enfants dans la benne. Avec des gestes (ici peu parlent anglais), je demande au chauffeur s’ils sont d’accord pour qu’on monte faire un tour avec eux : c’est OK !
Nous faisons ainsi un tour de la vieille ville – un tour qui prend longtemps à cause des bouchons ! Les enfants du pick-up giclent les passants avec des seaux d’eau, et nous avec nos fusils. Ils ont un grand fût de plusieurs centaines de litres dans la benne ; la recharge est rapide. Le petit garçon échange son seau contre un fusil, que nous lui laissons avec plaisir à notre départ.
Étant une route à plusieurs voies, nous sommes en pleine bataille d’eau avec les autres pick-ups. La benne est pleine d’eau, ça ruisselle de partout car nous nous faisons attaquer de tous côtés.
Le pire, c’est l’eau glacée ! Il y a des vendeurs de blocs de glace ; beaucoup en mettent dans leurs fûts. Déjà trempés jusqu’aux os, cette eau glacée fait un choc terrible.
Notre fût se vide en un peu plus d’un tour ; je fais signe à la famille de s’arrêter pour faire le plein (que je paye), et nous les laissons là en les remerciant beaucoup, puis nous continuons la fête de notre côté.
On barbouille les visages des autres
À nouveau au bord des douves, certains nous marquent le visage avec une pâte blanche ou colorée en nous souhaitant la bonne année. C’est surprenant pour une culture où on ne se touche généralement pas le visage, mais c’est un geste de bénédiction et de protection.
Nous achetons nous aussi de la poudre, qu’on mélange à de l’eau, et nous nous mettons à barbouiller les visages des autres. Beaucoup tendent la joue avec un grand sourire ; nous tendons la nôtre car eux aussi en ont.
Baignade dans les douves
On se pose un moment au bord des douves ; on retrouve d’autres touristes, des Allemands qui viennent à Chiang Mai chaque année pour fêter Songkran ! Selon eux, c’est le meilleur endroit. Vu les douves, certes que c’est l’un des endroits les plus pratiques pour recharger, mais vu les images que je reçois de Bangkok, ça doit être pas mal là-bas aussi.
Timeo rejoint l’un des Allemands dans les douves – de toute manière, nous sommes trempés et dégoulinants de la même eau. Cyliane et moi sommes assis au bord, les pieds dans l’eau, rechargeant nos fusils sous l’eau.
Cortège
Nous retournons à l’hôtel pour nous sécher un peu, le temps d’attendre l’heure du cortège.
Le cortège passe devant notre hôtel : on voit défiler plein de chars qui promènent les statues de Bouddha de tous les temples des environs, afin que les gens puissent les bénir en les aspergeant d’eau. Des moines bouddhistes font aussi partie du cortège et s’amusent à regarder les gens qui viennent les mouiller ; pareil pour de belles femmes en tenue traditionnelle.
On nous a dit de ne pas gicler les gens au visage ; pendant le cortège, beaucoup vont vers les défilants et leur versent de l’eau sur l’épaule. Il y a beaucoup de respect. Certes, certains balancent des seaux d’eau de loin ou giclent avec des tuyaux ou pistolets, mais généralement, les gens font attention.
Je suis la tenancière de l’hôtel qui va mouiller un groupe de dames ; je veux moi aussi faire pareil. Les dames me sourient en mettant en avant l’épaule qu’elles voudraient que je mouille. Il fait chaud, très chaud même, donc j’imagine qu’un peu d’eau sur leurs épaules leur fait du bien.
Le cortège dure ; ça devient très long. Les enfants en ont marre et rentrent à la chambre. Comme le cortège est souvent arrêté, je marche en direction de la fin pour avancer un peu. Je n’ai plus de batterie ; il y a plein de beaux chars, mais j’en ai déjà pris tant en photo et en film que ce n’est pas grave.
Songkran dans notre chambre
Le soir, un gros orage éclate. Après avoir soupé, nous retournons à notre chambre et avons la surprise de voir beaucoup d’eau couler entre la chambre et la salle de bain, créant un rideau à la porte. C’est le toit de l’hôtel qui fête Songkran !
Heureusement, la tenancière est encore là ; elle vient voir. Nous sommes au premier, juste sous le toit. Elle nous propose d’abord deux chambres à l’étage, puis préfère nous mettre dans la chambre à trois juste au-dessous de la nôtre. Sans surprise, de l’eau coule des murs et il y a de petites flaques au sol.
Étant une chambre pour backpackers, chaque lit a son armoire qui ferme à clé ; nous pouvons mettre nos choses à l’abri de l’eau et déplacer un peu les meubles. La tenancière nous amène des serpillières pour le sol.
Jours 2 et 3 de Songkran
Songkran, c’est sympa et rigolo pendant une journée. Être toujours mouillés, même quand il fait chaud, on commence quand même à avoir froid ; et puis on a vu, on a fait le tour, c’était marrant.
Toujours nos affaires dans des sacs étanches, nous essayons de faire les touristes pour visiter la ville sans se faire mouiller – ce qui est quasiment impossible. Ils sont partout : devant presque chaque commerce, avec leurs tuyaux, seaux et fusils à eau, à ça s’ajoutent les touristes. On va manger au restaurant : on est mouillés. On va voir un monument : on est trempés. Autant on se réjouissait d’aller fêter Songkran, autant là on se réjouit que ça soit fini. Trois jours, c’est long !

