Etant en saison cyclonique, nous vérifions la météo quotidiennement. Une perturbation s’est formée et risque de se transformer en cyclone, nous l’avons à l’œil et sommes à tout moment en train de contrôler toutes nos ressources météo.
Une seconde perturbation s’est formée, qui elle aussi risque de se transformer. La première perturbation disparaît alors que la 2ème continue de s’agrandir et se transforme en dépression tropicale. Les prévisions sont très mauvaises, presque tous les modèles ont conclu à un cyclone passant près de nous.
Nous décidons
de nous rendre à Denarau le lundi 14 pour préparer les bateaux à aller dans la
mangrove. IMPULSO et POGEYAN sont déjà partis le jour d’avant.
Le cyclone a
été nommé Yasa, Alors que les météorologues calculaient sa trajectoire entre
les Vanuatu et Fiji, Yasa s’amuse à faire un petit rond qui complique toutes
les prédictions. C’est ça les cyclones dans le Pacifique. Pendant plus de 2
jours il tourne en prenant de l’ampleur, catégorie 1-2, ça va, ce n’est
« qu’une » tempête, on se rassure. Les prévisions le font passer
toujours un peu plus près de la côte est de Fiji, où nous nous trouvons.
J’appelle la
marina pour avoir une bouée, elles sont toutes occupées, il faut venir au
ponton, ils nous font des prix spéciaux pour qu’on puisse y préparer nos
bateaux. Merci à eux !
1) Lundi 14, la prédiction de l’après-midi prévoit le passage de Yassa en catégorie 4 sur Nadi, ce qui le fait passer sur nous
2) Lundi 14, la prédiction du soir prévoit le passage de Yasa en catégorie 5 un peu plus au nord
3) Fiji se trouve entre 2 cyclones : Yasa et Zazu
4) Mardi 15, certains modèles (ici Predictwind) continuent de prévoir le passage de Yasa sur nous (au bout du pointeur rouge)
5) Vue satellite avant son passage, on espère qu’il suit la trajectoire marquée de la flèche rouge
6) Vue satellite, en rouge le passage prédit officiel, en jaune le passage qu’il pourrait prendre. Le point rouge marque l’endroit où nous nous trouvons
Préparations à la marina
Dès notre arrivée, nous commençons à enlever les voiles avant, tant qu’il ne pleut pas. On est allé aider O2 à descendre leur génois, ils sont venus nous aider pour le nôtre, c’est plus simple quand on est plusieurs.
Je m’imaginais
qu’on serait tous stressés, on m’avait parlé de gens en panique, il n’en était
rien, jusqu’au bout, tout le monde s’activait dans la bonne humeur en
s’entre-aidant et nous avions toujours le temps de papoter un peu.
J’avais listé
les tâches à effectuer à tête reposée, ainsi il nous suffisait de suivre cette
liste et de cocher ce qui était fait. J’avais aussi mentionné les travaux que
pouvaient faire les enfants, Elina suivait la liste et donnait les instructions
aux petits, ce qui nous aidait sans nous déranger dans nos tâches.
Yasa a continué
de s’amplifier, le lundi après-midi, le cyclone prévu de catégorie 4 (ouragan
catégorie 3-4 selon l’échelle utilisée aux Caraïbes) devait passer sur Nadi,
c’est-à-dire en plein sur nous. Ça fait drôle, mais bizarrement, aucune panique
à bord, c’est toujours la bonne humeur chez tout le monde. On a pas mal à
faire, mais on a le temps.
Tabelle comparant les
catégories à Fiji et aux Caraïbes
Les prévisions
continuent de tomber, ouragan de force 5, plus on approche de son arrivée plus
ils prédisent qu’il sera plus fort que Winston, qui était l’ouragan le plus
puissant du Pacifique. Par contre sa trajectoire se trouve être déviée toujours
un peu plus vers le nord, on espère, car ce sont des prévisions mais l’ouragan
fait ce qu’il veut.
Le lundi
quelques bateaux sont déjà rentrés dans la mangrove. L’entrée se fait très près
de la marée haute, sinon la rivière n’est pas assez profonde, généralement à marée
montante ainsi si on touche, il n’y a qu’à attendre un peu pour se dégager. Ces
conditions limitent le temps d’entrée dans la mangrove. Le mardi soir, une
fournée de bateaux dont CORAL TREKKER entrent à leur tour dans la mangrove.
Nous décidons de ne pas suivre, car le temps d’arriver il fera nuit pour les
manœuvres d’ancrage dans le courant (d’abord l’ancre arrière ensuit celle à
l’avant, manœuvre que nous n’avons jamais fait de la sorte) puis il faudra
encore s’attacher aux mangroves d’un côté.
Nous passons
notre dernière soirée dans le nouveau restaurant mexicain qui se trouve être
excellent, où nous croisons les équipiers de quelques bateaux.
Le port se vide, on
protège les vitres des bâtiments
L’entrée dans les mangroves
Mercredi matin
tôt, Geoff est sur le ponton et nous donne toutes les instructions. L’un des
bateaux n’a pas pu monter jusqu’en haut, les autres sont restés à l’arrière.
Les petits catamarans doivent les dépasser et combler le trou, OLENA et VAVA-U
reçoivent une place fixe. Toute la manœuvre est coordonnée à la VHF, les
bateaux se suivent à la queue leu-leu et tout se passe à la perfection.
Tous les
bateaux sont dans la mangrove, nous pouvons attacher nos bateaux des deux
côtés. Le but est de placer le bateau comme une araignée au milieu de sa toile.
Afin de pouvoir se faufiler au plus près des mangroves, Stéphane y est allé
avec l’aide de Timeo à bord de notre planche paddle, alors que les filles nous
mettions des protections sur les amarres et les tendions une fois qu’elles
étaient attachées aux mangroves. Nous avions organisé de grosses amarres de 40
à 50m de long. Nous avons placé 3 amarres du côté droit et 5 du côté gauche,
d’où allait venir le vent.
Images drone : Martin
de VAVA-U
L’endroit où nous étions était très peu profond du côté droit, nous nous sommes mis assez à gauche, qui par chance était le côté d’où viendrait le vent. A la première marée basse, nous étions posés un peu de biais, nous avons pu nous approcher plus du bord à la marée haute suivante et avions le luxe d’être à plat. Les monocoques ne pouvaient pas en dire autant, à chaque marée basse, ils étaient penchés à près de 45°, certains ont même eu de l’eau à hauteur des hublots, voire même à l’intérieur.
Pendant que nous attachions les bateaux, d’autres se promenaient en annexe pour se visiter les uns les autres. Toujours cet esprit jovial et prêt à se donner un coup de main. Certains faisaient voler leurs drones. VAVA-U et CORAL TREKKER sont venus boire quelque chose chez nous. C’est vraiment pas l’ambiance que j’imaginais, j’étais positivement surprise, personne n’était apeuré, nous étions tous bien préparés.
Le jeudi matin
nous étions fin prêts, OLENA était nu. Le cockpit complètement vidé, la grande-voile
saucissonnée dans son sac, les autres voiles rangées, rien ne traînait, rien ne
pouvait s’envoler. Nous avions même sécurisé le toit de notre cockpit en y
posant la bôme et en sécurisant avec une corde. La planche de paddle trainait
au milieu du carré, ce n’était vraiment pas pratique, toutes les autres
affaires ont été rangées sur le lit d’Elina qui a dû déménager chez sa sœur
pour quelques nuits.
Visionnez la vidéo drone de notre ami Rich en cliquant ici. Vous verrez tous les bateaux dans la mangrove, Olena est visible vers 45 secondes.
Le passage de l’ouragan
Nous voyons le baromètre tomber, le nôtre sonne une alarme régulièrement. Nous sentons le vent en haut du mat, ça vibre, mais au niveau du cockpit ce n’est pas grand-chose. On se promène autour du bateau sans souci.
A ma grande
surprise, Geoff après nous avoir demandé ce que disent nos baromètres, nous
annonce qu’on est au plus près de l’œil. La nuit n’est même pas encore tombée,
je m’imaginais y avoir droit toute la nuit. Nous surveillons le baromètre, il
tombe encore un chouilla jusqu’à 993.5 avant de remonter. Geoff a raison, à
présent l’ouragan s’éloigne de nous, à moins qu’il change de trajectoire, nous
n’avons plus aucun souci à nous faire.
Alors qu’on
était au plus près de l’œil, la lumière est devenue jaunâtre et nous avons vu un
bel arc-en-ciel. Il pleuvait un peu, mais Yasa n’était pas un cyclone très
pluvieux.
Il nous a
semblé avoir eu peu de vent, mais comme la plupart d’entre-nous avions enlevé
les girouettes pour les protéger, impossible de savoir la force du vent. A la
marina de Vuda, à moins de 9km de notre emplacement, ils ont mesuré 48
nœuds ! On n’aurait pas cru, preuve que la mangrove protège bien.
Mais notre
grande chance était que l’œil est passé à près de 180km de nous, nous n’avons
pas eu les vents destructeurs.
Sortie de la mangrove
Le jeudi matin
nous avons tous enlevé très rapidement les amarres, car la marée haute était
assez tôt et beaucoup voulaient sortir. Etant l’avant-dernier grand catamaran,
c’était mieux que nous sortions pour faciliter la sorties des autres derrière
nous.
La nature nous
a redonné un bel arc-en-ciel à voir avant notre sortie.
Nous avons tous
repris place dans nos mêmes boxes ou bouées à la marina. Le vent était fort,
les manœuvres pas faciles. Une fois le bateau amarré, nous allions aider les
prochains à amarrer, ainsi les manœuvres de tous se sont très bien passés.
Une grosse
révérence et un grand Merci à Geoff et au staff de la Marina Denarau. Leur
organisation a été parfaite, le tout s’est déroulé mieux qu’on aurait pu
l’espérer.
Le tout fut un
très bon exercice pour le prochain cyclone, car nous sommes qu’au début de la
saison cyclonique. Et comme j’ai dit aux enfants, ce n’est pas parce qu’on a
rien eu à un catégorie 5 qu’il faut minimiser la chose, un catégorie 3 qui
passe droit sur nous, ça sera pire !
Nous avons remarqué
que le lendemain du passage d’un cyclone, il y a des vents assez forts avec
beaucoup de rafales. Nous avions l’impression faussée qu’ils étaient plus forts
que ce que nous avions pendant le passage de l’ouragan. C’était très
désagréable, nous aurions été bien mieux en restant 1 jour de plus dans la
mangrove.