Nous contournons l’île de Batam et nous voici longeant la route maritime la plus fréquentée au monde : la côte sud de Singapour. La voie maritime est une autoroute à cargo à au moins 6 voies. Notre AIS réceptionne dans les 1350 signaux, la VHF émet sans cesse. Nous allons passer notre dernière nuit vers une île indonésienne avec une belle vue sur Singapour.
Visite
affamée
Alors que
la nuit commence à tomber voilà un local indonésien qui vient nous expliquer à
l’aide de signes qu’on ne peut pas rester ici. A l’aide de signes et des
quelques mots qu’on connait nous lui expliquons que nous ne pouvons pas
traverser la voie maritime de nuit et que d’autres amis ont déjà ancré ici sans
problème. Ensuite il nous demande un peu d’argent pour nourrir sa famille.
J’ai
l’habitude de ne pas donner d’argent mais de plutôt distribuer de la
nourriture. Bizarrement là je me sens toute désolée, nous n’avons plus aucun
sou indonésien ni de dollars de Singapour. Je demande à Timeo d’aller chercher
des boîtes de Spaghetti (que nous ne mangerons jamais, je les avais achetées
pour les mettre dans le sac à prendre avec si nous devons aller dans le radeau
de survie), quelques paquets de biscuits et autres bricoles.
Timeo
s’active à la tâche mais revient fâché avec la nourriture, pensant que si tout
le monde vient quémander notre manger il ne nous restera plus rien (ne vous en
faites pas, nous avons toujours plusieurs mois de réserve de nourriture à
bord). Alors qu’on remet la nourriture à ce monsieur, sa réaction et son regard
vaux mieux que toutes les paroles de remerciements. Alors que pour nous ce
n’est que quelques boîtes et paquets, pour lui c’est une bénédiction, et le
paquet de biscuits un trésor ! Il est parti tout heureux et moi je n’avais
qu’une envie, de lui courir derrière pour lui donner encore plus.
J’ai
souvent eu des regards de gratitude en remettant de la nourriture à des gens
dans la rue, mais là c’était différent, ça m’a profondément touché.
Traversée
de la route maritime
La route maritime est large d’environ 2.2km, des cargos énormes se suivent et se dépassent, nous voyons l’un des plus gros cargos qui fait 400m de long ! La route maritime autour de Singapour a des passages pour les traverser, tout comme les passages piétons sur nos routes. Chaque passage a son propre canal VHF où nous devons demander l’autorisation de traverser.
Nous nous
approchons de la voie tout en surveillant les cargos à l’AIS. Alors qu’il nous
semble avoir une possibilité nous appelons pour demander l’autorisation de
traverser, c’est refusé, nous devons attendre. Nous entendons également le
refus à un ferry qui veut faire la traversée en sens inverse. Puis le
contrôleur demande à certains cargos d’augmenter leur vitesse, ce qui n’a pas
l’air d’arranger certains capitaines qui réclament car ça augmente la
consommation de carburant.
Après un
moment d’attente, nous voyons une autre possibilité de traverser, nous
réitérons notre demande qui cette-fois nous est accordée après le passage d’un
certain cargo. La traversée des voies menant de l’ouest à l’est est facile, il
y a un grand creux, par contre il nous faut mettre les gaz et changer un peu le
cap pour passer entre certains cargos sur les voies menant de l’est à l’ouest. Ce
n’est pas le moment de tomber en panne !
Comme
toujours, Stéphane a navigué comme un pro alors que moi je calculais le
meilleur angle à prendre par rapport à la vitesse des différents cargos pour ne
pas passer trop près devant leur nez.