Orage, dérives en groupe et collision

 L’orage


Alors qu’on se rend à terre retrouver nos enfants à la piscine pour souper ensemble au Yacht Club, on voit au loin de beaux nuages bien noirs (voir photo). Avec les KANALOA on hésite, eux ont déjà commandé les boissons. Trish et moi nous nous regardons et on se comprend. De suite on va à la piscine presser les enfants de sortir et rentrer.

Lorsqu’on part du ponton on repère les annexes restantes, ANANDA et QUIDDITY sont à terre, il nous faut avoir un œil sur ces deux bateaux.

 

QUIDDITY chasse

Avec tout le plastique dans ces eaux on se ramasse un sac dans l’hélice de l’annexe qu’on n’arrive pas totalement à enlever. On se dépêche car on voit QUIDDITY chasser. On remonte l’annexe pour enlever le reste de plastique, ce qui nous fait perdre du temps et organisons par VHF pour voir qui peut aller aider QUIDDITY, j’essaye également de les appeler sans succès. D’autres bateaux sont déjà en train de chasser et de réancrer, seul Michael de NEBO répond présent, il faut aller le chercher.

 

OLENA chasse

Alors que Stéph est en train de redescendre l’annexe il me dit de mettre les moteurs et de tenir avec un peu de marche avant contre le vent. Je veux monter les bâches pour voir autour, Stéph refuse car le cockpit va ramasser toute la pluie. L’alarme de mouillage se met en marche, je crois que Stéphane l’a entendu car il me dit encore un truc avec la marche avant.

Cyliane part avec Stéphane comme chauffeur, car une fois sur QUIDDITY il veut pouvoir manœuvrer sans annexe au chemin.

Seule avec Timeo je lui lance des ordres car je suis bloquée à la barre, et je peine à maintenir OLENA dans le vent, on part toujours d’un côté ou de l’autre. Je veux voir mes cartes marines, l’écran ne veut pas fonctionner. Timeo descend la TV et il n’arrive malheureusement pas non plus à afficher mon programme de navigation. Je rage, je ne vois rien car bien sûr il fait nuit et il pleut des trombes. Je suis à 2 doigts de réclamer des ciseaux pour couper le filet obscurcissant la fenêtre de la bâche que je dois de toute manière refaire.

Je ne le sens pas, je veux partir au large attendre loin de tout danger puis revenir après l’orage. Timeo essaye de monter l’ancre en vain, il me dit que la chaîne est tendue en arrière ce qui me semble impossible. Je ne peux pas quitter la barre pour aller l’aider.

 

Collision

A un moment je crie à Timeo d’éteindre toutes les lumières. Je m’énerve, de nuit on navigue sans lumières pour voir autour, le fait d’être ancré en pensant dériver qu’un petit peu je n’y ai pas pensé. Sans accès aux écrans de mon programme de navigation depuis la barre je suis comme aveugle, quelle galère.

Toujours en marche avant, pas trop forte car je ne veux pas dépasser l’ancre et la soulever, je me retourne et je vois la pointe de NEBO nous foncer dessus sur le côté. Nous sommes devant eux, même si j’ai cette vision qu’ils nous arrivent dessus à toute vitesse, je sais que c’est nous qui dérivons sur eux et très vite.

Gaz à fond je pars marche avant sur leur côté pour essayer de les éviter, bien que je sache que la collision est inévitable. Je ne lâche pas NEBO des yeux pour stopper la marche avant de notre moteur bâbord à temps afin de ne pas se prendre l’hélice dans leur chaîne.

La collision est adoucie car on tape d’abord leur chaîne avec notre quille. J’ai mal au ventre de penser aux dégâts.

 

NEBO dérive

Tout à coup j’entends la petite voix d’Elaine à la VHF « NEBO est en train de dériver et je ne sais pas quoi faire », mon sang se glace. Je ne peux même pas prendre une VHF pour l’aider, je suis trop affairée avec mon propre bateau. Heureusement Marc de 9 LIVES lui explique calmement de mettre le moteur en marche etc… Le fait que NEBO dérive fera certainement revenir Stéph et Michael, une bonne chose pour moi aussi.

Chronologiquement je ne me souviens pas si NEBO a commencé à dériver avant ou après notre collision, logiquement je dirais que notre collision l’a amené à chasser.

 

Je traîne l’ancre

Timeo n’arrive toujours pas à monter notre ancre, il me dit qu’elle est coincée derrière nous. C’est pas logique, je suis partie à fond sur le côté, pas en avant.

Bref, à Tuaran les LIDA GIRL ont traîné leur ancre puisque leur guideau ne fonctionnait plus, je vais faire pareil, je n’ai pas le choix. Derrière nous quelque part il y a le gros dock en béton pour les cargos où se trouve déjà QUIDDITY.

Je vois un passage entre ANANDA et 9 LIVES, je m’enfile espérant partir au large. Petit à petit j’avance, mais la joie est courte, OLENA est stoppé entre les 2 bateaux. J’ai les 2 bateaux en vue et je manœuvre pour maintenir OLENA entre les deux, ce n’est pas super large mais MARC est à la barre de 9 LIVES et manœuvre de côté pour me faire de la place. Les minutes passent, notre ancre ne bouge pas et j’ai juste ce qu’il faut de gaz pour maintenir OLENA sur place.

 

Stéphane revient

On est toujours en plein orage, il pleut, le vent est fort.

Stéphane revient, Cyliane est trempée et grelottante. Elle a attendu tout le temps sur l’annexe aux alentours de QUIDDITY en pleine pluie. Ils ont mis un moment à nous retrouver, c’est là que je réalise que Stéphane n’avait pas entendu l’alarme d’ancre, j’aurais dû le lui dire, il ne serait pas parti. La communication c’est la clef de tout !

Stéphane reprend la barre et je vais monter l’ancre à l’aide de Timeo. Petit à petit elle monte, elle est tendue à l’arrière puisqu’on a été stoppé, Stéphane recule gentiment afin qu’on puisse la remonter.

En un coup la chaîne se tend complètement en arrière. Je me couche sur le trampoline pour voir. Je vois notre ancre, elle est prise dans une corde d’un diamètre d’environ 1cm. Je ne sais pas ce que c’est, je vais au mât prendre le couteau et je coupe.

Notre ancre levée, nous partons nous ancrer en toute sécurité.

 

10 bateaux sur 12 ont chassé

Une fois à l’intérieur, je peux voir notre programme de navigation où l’on voit bien les lignes de déplacement des bateaux. 10 bateaux sur les 12 à l’ancrage ont chassé. Les KANALOA ont chassé sur plus de 100 mètres en passant par notre point d’ancrage.

 

QUIDDITY est en sécurité

Stéphane et Michael n’ont pas réussi à mettre le moteur en marche. QUIDDITY a dérivé à l’intérieur du dock et par chance il n’y a pas de cargo en ce moment. Seconde chance, le bateau s’est arrêté avant le ponton, mais il reste dangereusement très proche.

Trish et Morgan (ado) viennent prendre la relève et n’arrivent pas non plus à mettre le moteur en marche. Ils balancent l’ancre de secours de manière à ce que QUIDDITY ne puisse pas taper contre le dock si le vent tourne.

 

Presque pas de dégâts

Une fois le calme revenu, j’écris à Elaine pour m’excuser, j’espère que notre collision ne lui a pas trop fait peur. Elle me répond « quelle collision ? ». A l’intérieur du bateau elle n’a rien senti. Leur chaîne (et un tout petit peu ma manœuvre) a adouci le choc.

Le lendemain on cherche les dégâts, Nebo n’a aucune marque, rien. Je suis soulagée.

OLENA a une petite accroche dans le rail aluminium qui ferme le dessus du pont et de rares petites griffures. On a tapé dans NEBO exactement au même endroit que WIRRAWAY nous était rentré dedans.

Stéphane adoucira ces dégâts à l’aide d’un peu de polish et quelques coups de limes, mais il n’est pas très contant. Quelques jours plus tard il plongera pour voir les marques qu’ont laissé la chaîne sur notre quille. Rien de grave mais ça ne plait pas à Stéphane.

Un bon moment on a cru que la corde qui maintenait notre ancre était peut-être la corde que 9 LIVES avait à son ancre pour la marquer à l’aide d’un flotteur en surface, puisque le flotteur a disparu. Mais au moment où ils lèvent leur ancre, le flotteur apparaît, la corde est entière. Un truc avec des cordes dérivant avec le courant sous l’eau se serait pris dans notre ancre ? On ne saura jamais.

 

L’ancrage de Tawau n’a pas de bon maintien

Nous aurons plusieurs nuits de gros orages, parfois en plein milieu de la nuit. OLENA ne dérivera plus.   A l’un d’eux à 1h30 du matin, ANANDA, qui est l’un des 2 bateaux qui n’a pas dérivé cette fameuse nuit, s’est mis à dériver. Je surveille sur l’AIS, on regarde le bateau, il n’y a pas de lumière. Au bout d’une centaine de mètres, je les appelle. Ils sont réveillés, ils surveillent et espèrent que l’ancre se replante. Pour finir ils montent l’ancre et vont ancrer ailleurs.

Depuis les années qu’ANANDA parcourt les océans ils ont dérivé 2 fois, les deux fois étaient à Tawau.

Il faut dire qu’il y a de très gros courants dans cette baie, nous avons mesuré jusqu’à 4 nœuds. Le cumul du vent fort d’un gros orage avec ces courants et le nombre de plastique sur le sol, c’est un peu logique que les ancres ne tiennent pas.

 

Courant à Tawau