Nous sommes plusieurs bateaux au mouillage qui ont prévu de faire la clairance de sortie du pays ici. Jusque là c’était toujours gratuit comparé aux 3 endroits proches de Singapour qui profitent de la situation en sucrant les prix en imposant agent et séjour dans les marinas.
Le premier revient de la ville et nous informe que ça a changé, qu’ils
imposent Ervan, propriétaire du Yacht Club, comme agent. 2-3 autres bateaux y
vont le lendemain, même information. Nous sommes tous en train de chercher la
nouvelle loi, même Ivan, notre ami voileux marié à une Indonésienne en route
pour venir ici faire sa sortie ne trouve pas. Comme par le passé le pays a
connu beaucoup de corruption à l’immigration, nous pensons tout de suite à ça.
Les prix salés d’Ervan du Yacht Club
Non seulement Ervan, le tenancier du Yacht Club, sale les prix des
bières et loue sa voiture à prix bien supérieur que les autres loueurs de la région,
ses prix de service ont connu une forte hausse.
En 2022 il demandait 1mio d’IDR pour faire toute la clairance, à
présent, en 2024 il a triplé son prix ! Un des bateaux a réussi de marchander
ce prix pour le descendre à 2.4mio d’IDR. Il est à savoir que le salaire journalier
d’une personne qualifiée à Bali est de 150'000 IDR, et qu’à Belitung les
salaires seraient un peu moins hauts qu’à Bali. Il demande 20 jours de salaire de
qualifié balinais pour ½ journée de travail et 55-60km de route aller-retour,
rien que ça. Triplé le prix en 2 ans, si tout le monde paye sans rien dire,
combien demandera-t-il dans 2 ans ?
Les bateaux refusant de faire faire la clairance à Ervan ont dû lui
demander un papier, une simple lettre mentionnant le nom du bateau, des
passagers et sa signature à lui. La semaine dernière il demandait 750'000 IDR
(5 jours de salaire d’un balinais qualifié pour 15 minutes de travail).
Apparemment certains ont dû réclamer car au jour d’aujourd’hui, il a baissé à
600'000 IDR, c’est-à-dire le salaire de 4 jours de travail.
Nous allons faire notre clairance
Comme tous les bateaux avant nous, nous tentons d’aller faire notre
clairance par nous-même. Nous avons loué une voiture avec chauffeur non loin du
mouillage.
N’utilisant pas les services du Yacht Club, on échoue notre annexe un
peu plus loin sur la plage. On voit l’employé du Yacht Club et un autre nous
regarder échouer l’annexe et partir avec la voiture de l’autre loueur.
Les formalités à la douane et au garde de port se font facilement, la
douane nous prie de leur envoyer quelques photos une fois de retour à bord.
L’immigration
Généralement pour la clairance de sortie d’Indonésie les bureaux sont à
visiter dans un certain ordre, mais bizarrement à Belitung c’est le contraire,
l’immigration veut être visitée en dernier alors que partout ailleurs c’est le
premier poste à visiter. Plusieurs y ont été en premier et ont été priés de
revenir après le passage des autres bureaux. Ainsi une fois les papiers des
autres autorités en main, nous n’avons d’autre choix que d’accepter les règles
de cette immigration, il n’est plus possible de partir pour faire sa clairance
ailleurs.
Comme pour les autres passés avant nous, l’employée nous demande le
papier de notre agent. Nous n’en avons pas, nous sommes à notre 3ème
sortie de ce pays et avons l’habitude de le faire sans agent. Elle insiste sur
quoi nous lui demandons à voir cette nouvelle loi, car le dicton dit qu’en
Indonésie les pirates portent l’uniforme ! Comme déjà dit, ils ont eu
beaucoup de corruption dans les bureaux d’immigration, d’ailleurs il y a des
affiches dans les immigrations informant qu’on doit refuser la corruption et de
plus il est conseillé de demander de voir sur quoi se base leurs demandes.
Elle nous montre la nouvelle loi du mois de juin de cette année, où il
est indiqué qu’un bateau étranger doit avoir un garant indonésien pour l’entrée
dans le pays. On a beau faire traduire cette partie et lui montrer que c’est
pour l’entrée dans le pays et non pour la sortie, rien n’y fait, ils veulent un
agent local de cette île. Quel est le choix des agents ? Ervan ! Tiens
donc, ce serait le seul agent de l’île ?
Sale coup d’Ervan
Stéphane assis en face de l’agent d’immigration appelle Ervan, le temps
de dire qu’il est à l’immigration et qu’il a besoin d’un papier de lui voilà qu’Ervan
raccroche. Il rappelle plusieurs fois, Ervan ne répond même plus. Il faut dire
qu’un ou deux jours avant nous, un autre bateau dans la même situation que nous
l’a traité d’escroc.
Que fait-on ? N’y a-t-il pas un autre agent ? L’employée va
fouiller dans une grosse pile de documents et cherche un bon moment avant de
tomber sur une des lettres signées par un autre agent. Stéphane toujours assis
en face d’elle essaye d’appeler le nouvel agent, il a répondu et en entendant
parler anglais il a raccroché.
N’ayant pas la patience de Séphane sur ce coup, j’attends dehors. Je
vois arriver une voiture d’un couple blanc avec un chauffeur en casquette rouge.
D’après les photos que j’ai vues d’Ervan je suis presque certaine que c’est lui
et le couple de blanc c’est presque sûr que ce sont des voileux. Le type à la
casquette rouge, Ervan, rentre dans l’immigration, s’arrête à côté de Stéphane,
remet des documents à l’employé et repart. Ceci environ 5-10 minutes après que
Stéphane l’ait appelé, Ervan savait donc très bien que la personne assise à
côté de lui était celui à qui il a raccroché au nez.
Ervan ressort, échange quelques mots avec une dame locale sur la place
de parc et s’en va. Juste pour être certaine, je demande à la dame si ce
monsieur à la casquette rouge est bien Ervan, ce qu’elle me confirme.
Sympa le tenancier du Yacht Club ! Tout ça parce qu’on est une équipe
qui refuse ses arnaques de prix et qu’on a préféré les services d’un autre
chauffeur. Je rentre dans le bureau informer Stéphane et l’employée que le type
qui vient de venir était Ervan. L’employée nous prie de revenir après la pause
de midi.
Petit tour en ville
Nous passons un bon petit moment avec notre chauffeur super sympa et
très intéressant. Il nous confirme les prix des salaires locaux en mentionnant
que les salaires à Belitung seraient même un peu moins hauts qu’à Bali. Il est
scandalisé par les prix demandés par Ervan. Il nous dit avoir déjà voulu
essayer de faire l’agent pour certains voileux mais l’immigration refuse ses
services. Ça nous donne l’impression qu’Ervan a le monopole pour les voileux.
Nous allons faire un tour dans un magasin qui vend de tout dont j’ai lu des éloges sur l’application pour voileux Noforeignland. Effectivement ça vaut le détour. Il y a les animaux, de pauvres bêtes enfermées dans leurs petites cages dont des oiseaux, poules, mangouste, singe et même un hérisson avec son nouveau-né. Puis les armes à feux, les choses pour la pêche et autre bric à brac, c’est assez impressionnant.
Après un bon lunch on retourne à l’immigration.
Second passage à l’immigration
L’employée nous voyant revenir pâlit, on peut lire sur son visage qu’elle
espérait bien ne plus nous revoir. Comment ne pas revenir alors qu’elle a gardé
nos passeports et tous nos documents ? Et comme ici l’immigration veut
nous voir en dernier, il est à présent impossible d’aller faire la clairance
ailleurs.
Stéphane passe encore un bon moment assis en face d’elle, calme en apparence
mais bouillonnant à l’intérieur, à lui demander une solution. Les seuls 2
agents qu’elle a pu nous fournir les contacts refusent de répondre au
téléphone. Que faire, la douane et le garde-port sont réglés, on doit partir.
Le chef de l’employée n’est toujours pas de retour, étant vendredi il
risque de ne plus revenir du tout. Elle prend son tampon et nous tamponne discrètement
les passeports à contre-cœur. Il nous manque notre carnet vert de l’office
sanitaire, elle devient livide, elle ne le retrouve plus. Stéphane lui montre
une pile où elle a posé plein de feuilles, en-dessous il y a du vert. Elle
reprend ses couleurs, c’est bien notre carnet.