Nous mouillons dans la baie de Hakahetau qui se trouve du côté nord-ouest de l’île alors que le Festival se déroulera à Hakahau, au nord-est. On nous avait averti lors de notre passage en juin, que la baie de Hakahau sera fermée aux voileux (plaisanciers), ce qui ne s’est pas avéré tout à fait exact, mais fallait y aller très tôt pour y avoir une place, car c’était déjà plein.
Hakahetau est une très jolie baie avec un village sympa et
un bon chocolatier en haut dans la montagne. Malheureusement en cette période,
elle est ouverte en plein sur la houle.
La baie est grande, sans être énorme. Mais quelle est notre
surprise de voir des bouées de zones d’ancrage ! Il y avait déjà une
quinzaine de bateaux entassés dans cette zone et nous étions 2 catamarans à
arriver en même temps. Nous avons fait au mieux pour nous ancrer dans la zone,
juste à la limite.
Puis un plaisancier sympa vient nous avertir qu’il faut
s’annoncer au pompier car ils prévoient 20 bateaux dans la zone et veulent
savoir le nombre de personnes à bord pour l’organisation du transport à
Hakahau.
Hakahau
Les préparatifs pour le Festival
Le lendemain, un autre plaisancier arrive « rendez-vous
au quai dans 10 minutes pour une séance d’information pour le Festival !»
Martin, un local, voyant le nombre grandissant des voiliers
dans la baie a décidé de s’occuper de nous. La première information, applaudie
par tous, a été d’ignorer les balises de marquage de zone de mouillage, qui
n’existe pas le reste de l’année. Ensuite on établit une liste de bateaux avec
nombre de passagers pour l’organisation d’un bus. Il nous donne le programme du
Festival et toutes les infos nécessaires.
Quelques jours plus tard, on se retrouve tous avec Martin.
Les trucks ne sont toujours pas encore arrivés sur l’île, et ce n’est pas
certain qu’ils vont arriver et si c’est le cas, ce n’est pas certain qu’ils
pourront faire la route entre Hakahau et Hakahetau, qui est une piste en terre
qui serpente dans la montagne. Il y a juste quelques endroits qui ont été
bétonnés. Martin cherchait une personne de contact afin de faire le relai avec
les autres par VHF. Etant polyglotte, j’ai été désignée d’office par les
français et les anglophones. J’ai passé quelques matinées entre le téléphone et
la VHF.
Les bus ne sont pas arrivés et Martin nous a organisé des
« Taxis ». Ce sont des privés qui faisaient le voyage pour nous pour
un prix fixé par les locaux.
Le Festival
Le lundi c’était l’ouverture du festival des arts des
Marquises. Le programme étant principalement des discours, je n’ai pas voulu y
emmener les enfants, pour ne pas prendre le risque qu’ils ne veulent y
retourner le lendemain. C’est seul que Stéphane s’y est rendu, avec d’autres
plaisanciers bien sûr.
La houle a fortement augmenté ce jour-là, les filles ayant
eu un rendez-vous chez le restaurateur, je les ai juste déposées, impossible de
laisser l’annexe au ponton ni Olena seul dans la baie. Le débarquement des
filles et le réembarquement était sportif. L’annexe tel un ascenseur, montait
et descendait de plusieurs mètres le long du quai. Pas facile de le maintenir
pour que les filles puissent y entrer et sortir. Aucun bateau n’a chassé, tout
est bien allé et la houle s’est calmée pour la soirée.
Le lendemain, nous quittions le bateau à 5h30 pour retrouver
Manfred, le chocolatier. Il devait se rendre à Hakahau et nous a proposé de
nous y emmener, merci à lui ! Là j’ai réalisé que la piste n’aurait pas pu
être praticable par un truck d’école avec 50 personnes à bord. Et pourtant, une
bonne partie de la piste venait d’être élargie et aplatie, car ils sont en
train de bétonner quelques kilomètres supplémentaires.
Photo
truck
Truck à Tahiti (camion sur lequel ils ont monté une partie bus en bois)
Arrivés à Hakahau avant 7h30, j’ai été étonnée de voir les
gens s’activer, on se serait cru en milieu de matinée. Ici les gens se lèvent
tôt ! On a pu aller voir les fours marquisiens, qui sont de gros trous
dans la terre, dans lequel ils font du feu qu’ils recouvrent de pierres volcaniques,
puis de la nourriture emballée dans des feuilles de bananier et paniers
tressés, le tout recouvert de terre. Ils laissent la nourriture cuire ainsi
pendant des heures. Notre repas de midi était dans ces fours, déposés le jour
d’avant, près de 24h de cuisson !
Le marché d’artisanat marquisien était déjà ouvert et plein de gens. Chaque île avait son coin, on pouvait ainsi comparer les différents styles. Sculptures, colliers en coquillages ou graines, instruments de musique, tableaux en tapa (tissus fabriqué avec de l’écorce végétale), paniers tressés... il y avait de tout.
Un peu plus loin il y avait les tatoueurs, car ceci fait partie de la culture polynésienne et les marquisiens sont connus pour être de très bons tatoueurs. Il y avait même une démonstration de tatouage à l’ancienne, c’est-à-dire avec un peigne qu’on tape sur la peau.
A l’autre bout, des gens s’affairaient à sculpter de gros tikis (statue représentant un homme ou une femme avec de très gros yeux) en bois ou en pierre. C’était intéressant de passer à différents moments de la journée pour voir l’avancement. Ce qui m’a impressionné c’est qu’ils y travaillaient à plusieurs, chacun faisant son truc avec un beau résultat final, comme si un seul sculpteur l’avait fait.
A plusieurs moments de la journée, nous avions des danses à
regarder. Musiciens, chanteurs et danseurs sont venus de toutes les îles des
Marquises ainsi que certains d’autres archipels. Il y avait même un groupe de
Rapa Nui, île de Pâques. Cette île appartient au Chili et ils y parlent
l’espagnol. Mais quand on regarde les gens, ce sont des Polynésiens, et ils
aimeraient bien faire partie de la Polynésie.
Les spectacles de danse et de chants étaient similaires à la Heiva à Tahiti.
C’était magnifique à voir et à entendre. Leurs costumes faits d’éléments
naturels sont magnifiques. Un groupe de danseurs avaient utilisés des sacs de
jute, Timeo m’a fait remarquer que ça sentait St-Nicolas, il avait tout à fait
raison. Puis vint un groupe qui a aussi utilisé des sacs de jute, mais des
anciens sacs de transport de copra (noix de coco séchées pour la fabrication de
l’huile), ça puait le copra, l’odeur rance de la noix de coco, c’était assez
désagréable.
Il y avait plusieurs milliers de gens répartis sur tout le
site, ce qui n’était pas si énorme et nous avons pu laisser les enfants jouer
sur la place. Ils se sont retrouvés entre kid-boats et se sont bien amusés.
Le buffet de midi
Malheureusement j’ai loupé l’ouverture des fours et la
procession, occupée à regarder le spectacle de danse de Tahiti. Stéphane lui
est allé voir la procession. Le manger a été réparti sur les différents stands,
représentés par chaque île marquisienne. L’énorme buffet a été ouvert après un
chant, que je n’ai pas entendu non plus. J’ai entendu des tambours non loin
d’où les danseurs faisaient leur show et je me suis demandée pourquoi ils
faisaient 2 show en même temps. C’est mes enfants affamés qui sont venus me
chercher pour faire la queue à l’un des buffets. Pour pouvoir être servis, il
fallait avoir des récipients en matière naturelle, le plastique n’était pas
toléré. Nous avions fabriqué des assiettes en bambou et en noix de coco avec
l’aide de Manfred le chocolatier.
Le repas était gratuit pour tous, et si vous aviez vu la quantité de
nourriture, c’était incroyable. On était quelques milliers, mais on aurait pu
nourrir plus du double, j’ai jamais vu autant de nourriture. C’est comme ça aux
Marquises, les buffets sont énormes, les gens se servent en très grande
quantité et les restes vont aux cochons. On a appris qu’ils comptent 3kg de
nourriture par personne pour l’organisation d’un kai kai (buffet).
La nourriture locale c’est le poisson, cru au lait de coco ou cuit, les coquillages et crabes crus (je n’ai pas osé goûter), la chèvre, le cochon (sauvage, car plus fort que la chèvre), les bananes cuites, les purées de uru (le fruit de l’arbre à pain), de la purée de potiron et j’en passe. Il y avait tant de choses inconnues, impossible de goûter à tout.
On a retrouvé Taina de
l’île de Tahuata au Festival
Le retour
Le Festival des arts des Marquises continue jusque tard dans
la soirée. Mais en fin d’après-midi, nous voulions retourner au bateau. Comme
la plupart des « taxis » retournent après les spectacles du soir, il
nous a fallu nous débrouiller en stop.
Un blanc de Papeete nous a ramené, il était en vacances chez
un ami et avait les 2 petits enfants de l’ami dans la voiture. Il a trouvé
assez ahurissant de savoir les voileux de l’autre côté de l’île sans bus et ne
comprenait pas qu’avec des enfants nous n’étions pas venu dans la baie de
Hakahau (pleine bien une semaine avant le Festival). Il a été encore plus
étonné de savoir que nous étions au moins 10 bateaux d’enfants et de loin pas
celui avec les plus jeunes. Il était heureux de faire une bonne action et avec
l’argent du voyage il pourra faire le plein de la voiture de son ami.
Il a commencé à faire sombre, la piste était glissante. Les
roues du pick-up ont patiné plusieurs fois avant de reprendre prise. Mais le
moment où je me sentais le plus mal est lorsque la petite fille de 7-8 ans
s’est mise à hurler d’arrêter la voiture et faire demi-tour car ils ne vont
plus avoir d’essence. Elle hurlait cette même phrase pendant de longues minutes
avant que le monsieur puisse la calmer, tout en continuant de conduire
prudemment. La maman de la fille vient de Hakahetau et elle savait que c’était
un long chemin.
Ils nous ont posés au village puis ont fait demi-tour. Nous
espérons qu’ils sont bien rentrés à Hakahau. Vous vous rendez-compte, ils ont
fait 40 minutes de trajet aller puis 40 minutes de trajet retour pour nous
ramener au bateau ! Ce n’est pas en Europe qu’on trouve facilement des
gens prêts à ça, même pour 50.-
Nous ne sommes pas retournés au Festival les autres jours.
Le mercredi le spectacle se déroulait à Hohoi, au sud-est de l’île, ce qui
doublait le chemin et le prix du voyage. Quant au dernier jour, c’était à
nouveau plein de discours. Le fait de trouver un taxi pour le retour enlevait
l’envie d’y retourner.