Un jour on entend à la VHF un bateau appeler pan pan (besoin d’aide, sans danger de personne). C’était MOGGY un catamaran australien, qu’on a souvent croisé sans faire connaissance. Ils n’étaient pas loin au dehors de la passe de la rade de Papeete et demandaient un remorquage immédiat à l’intérieur du lagon, ils coulent dans 5 minutes ! Le JRCC (ceux qui coordonnent les secours) communique avec eux et met plusieurs minutes à faire l’appel à tous à la VHF. Avant l’appel du JRCC, Stéphane avait déjà sorti notre pompe à eau 230V du fond de la soute.
La vigie de la tour de contrôle de l’aéroport avait même
informé voir le bateau une coque déjà sous l’eau ! On se trouve à
plusieurs kilomètres de Papeete, mais Stéphane part en trombe en dinghy. Les
secours maritimes sont une baie après nous, en direction de l’incident !
Ils ne se sont pas déplacés, ça ne les concernait pas.
Je contacte le bateau en détresse pour savoir s’ils ont
encore du courant ou s’il faut appeler pour trouver une génératrice portable.
Je n’ai pas compris sa réponse, sur quoi le JRCC me demande si c’est bien une
pompe qui est en route. Elle fait appel aux bateaux ayant une génératrice de
s’approcher du sinistre. Sur quoi j’ajoute que d’autres pompes seraient utiles
également vu la vitesse à laquelle ils coulent ! Les proprios du bateau
avaient informé entre deux que la 2ème coque était également sous
l’eau (plus de 5 minutes avaient passé…). Sur quoi la dame du JRCC me fait la
remarque que tout le monde a mesuré l’urgence de la situation. Apparemment non,
puisque peu de monde s’est déplacé.
Stéphane arrive bien 15 minutes après le 1er
appel d’aide, un petit cargo était déjà en train de les remorquer et naviguait
en direction de Moorea ! Ils n’avaient pas l’autorisation de rentrer dans
la passe, car il y avait un autre cargo en attente.
Le bateau flottait comme un radeau sur sa nacelle, les 2
flotteurs immergés. Ils ont installé la pompe sur le convertisseur des
batteries, car la génératrice était déjà sous l’eau et aucune génératrice
portable à l’horizon. Stéphane est resté dans l’annexe, il ne voulait pas
monter à bord et risquer de perdre notre annexe si le bateau coule. Mais il
restait près d’eux et ramassait les choses qu’ils semaient.
10 minutes plus tard, l’annexe d’un super-yacht est arrivée
avec une grosse motopompe. Une fois dans le port, un remorqueur, qui était en
attente depuis un petit moment, a pris le relay pour les derniers 100 mètres.
Je suivais tous les échanges par VHF et me demandais pourquoi il n’est pas
sorti. Ça aurait été plus simple pour un remorqueur que pour un cargo. Le port
de Papeete se trouve juste à côté de la passe !
Pendant le remorquage, le JRCC appelait les sinistrés avec
des questions… p.ex. le numéro de leur balise de détresse ! La dame avait
en ce moment d’autres chats à fouetter que de chercher ces infos dans son
bateau ! Sa balise était encore éteinte à ce moment-là. Quand elle s’est
activée toute seule, ils l’ont su le numéro, mais ils ont dû faire sûr qu’il
s’agissait bien du même bateau, car la balise était sous l’ancien nom du bateau
(ça peut prêter à confusion !).
Après-coup on a appris qu’il est très important pour le JRCC
de connaître le numéro de la balise, qui est en effet le numéro MMSI. Le
déclanchement d’une balise met en route une procédure de secours coordonnée à
l’étranger, probablement le CROSS de Gris-Nez en France. Le JRCC doit les
avertir de l’incident déjà sous contrôle afin de ne pas mettre de procédure en
route si la balise s’enclencherait. Nous
avons aussi appris que le travail du JRCC est de sauver des vies, pas les
bateaux, le pourquoi des questions de gilets de sauvetage etc…
Le JRCC avait organisé des pompiers avec des motopompes pour
leur arrivée au port quand ils ont eu l’info de témoins visuels qu’une annexe
était arrivée avec une motopompe. Puis ils ont eu l’info qu’ils étaient 4 à
bord à présent et non, ils ne portaient pas de gilets (je stressais, croyant
Stéph à bord).
Une fois le bateau au ponton, les pompiers sont arrivés avec
4 pompes, mais une seule fonctionnait ! C’est un bon moment plus tard que
d’autres pompiers sont arrivés avec les feux bleus et ont amené une grosse
pompe.
Au départ de Stéphane, le bateau flottait, mais beaucoup est
foutu, mécanique, électrique, les meubles ont pompé l’eau salée. Même dans le
carré il y avait de l’eau.
Le bateau sortait du chantier, ils avaient fait des trous
dans les escaliers des jupes pour sortir des cuves et les avaient colmatés
provisoirement. Pour se rendre dans la rade, on ne peut pas passer sous le
pont, on doit sortir par la passe et entrer dans celle d’à côté. A l’extérieur
une vague a arraché le colmatage provisoire, laissant 2 énormes voies d’eau
d’environ 40*25cm. Là on comprend mieux pourquoi elle disait qu’ils coulaient
d’ici 5 minutes !
Là aussi, c’est les gens du super-yacht qui ont été chercher
bouteilles de plongée et outils à air comprimé pour pouvoir visser des planches
sous l’eau. C’est incroyable, t’es en train de couler, peu viennent t’aider et
pas les pros qu’on imagine (qu’on entend tous les jours à la VHF annoncer au
JRCC qu’ils partent faire des entraînements). Puis tu n’as même pas la priorité
pour passer la passe !
Heureusement que la solidarité des plaisanciers existe, et
j’aurais jamais cru qu’un super-yacht viendrait aider pareillement. Bravo et
merci à ce magnifique super-voilier ETHEREAL !
Quelques jours plus tard, on entend l’appel d’un pêcheur en
panne moteur au loin de Tahiti. Le JRCC a voulu organiser un remorquage payant
(professionnel), impossible, aucun bateau en état. Au final ils ont dérouté un navire
de pêche espagnol qui passait au loin de Tahiti.